Bon, je vous fais vite vite un mini compte rendu de là où j'en suis, c'est-à-dire absolument au même point qu'avant. Pas de règles depuis le 22 octobre, et demain, c'est le 20 décembre. J'ai pris le machin truc pour déclencher mes règles, ça doit bien faire deux semaines, et puis voilà, toujours rien. Tant pis. Avec un peu de chance, je les aurai en 2010, ces maudites menstruations!
Mais trève de détails organiques: là n'était pas le but de mon propos aujourd'hui. Je venais écrire avec l'intention de me livrer, ma foi, sur quelque chose de beaucoup plus intime que ce qui (ne) se passe (pas) entre mes deux jambes...
Aujourd'hui, c'est de moi entre les deux oreilles dont il sera question. Ou peut-être que je devrais dire "entre les deux ventricules"...
***
Voilà: ce n'est plus un secret pour personne dans mon entourage: je suis infertile. Je veux un bébé, je veux être maman. En janvier, je "fêterai" mes 3 années d'essais infructueux avec mon partenaire officiel. Presque tout le monde de mon entourage connait ma situation, et jusqu'à présent, je me suis fait un devoir de parler, de dire ce que je vivais, de ne pas rester dans l'isolement avec mon expérience douloureuse. Avec mon tabou.
J'ai été bavarde, j'ai répondu aux questions, aux "comment vont tes hormones", j'ai expliqué aux curieux et aux curieuses, j'ai invité certains et certaines à venir me lire. Parce que je n'avais pas envie que le poids du tabou vienne s'ajouter à ce que je vivais déjà dans ma douleur de ne pas réussir à avoir un enfant. Aussi parce que je me disais que si personne n'en parle jamais, les gens vont continuer à avoir toutes sortes d'idées préconçues stupides à propos de l'infertilité. Des préjugés, des idées toutes faites, des conseils ignorants qui sont ô combien difficiles, douloureux et choquants à recevoir quand on vit l'infertilité. Quand on vit l'infertilité, et qu'on se fait garrocher au visage toutes sortes de trucs par des gens qui... ne passent évidemment pas par là. Je me suis dit que la cause me tenait assez à coeur pour, en quelque sorte, me pseudo-sacrifier, et en parler, même quand au final, ça aurait été plus facile de me taire, de ne pas tout dire sur moi, de mentir quand on me demandait pourquoi je n'avais pas d'enfant.
Eh ben voilà, Noël approche, avec son lot de connaissances qui vous disent encore une fois "On te souhaite le meilleur pour la nouvelle année!", le mot BÉBÉ imprimé dans le front, comme un message subliminal mal camouflé. Avec, aussi, son lot d'occasions de faire du "sôcial", et de parler de façon plus approfondie avec des gens qu'habituellement, on ne fait que côtoyer... Avec bien entendu son lot de partys, de soupers, et de rencontres de famille remplies d'enfants.
Comme tout le monde connaît ma situation, tout le monde veut savoir. "Puis, comment ça se passe?" "Quoi de nouveau?" "Comment ça va avec tes hormones?" "Là, t'es-tu sous traitement hormonal??" . Jeanette veut savoir. Jeanette veut TOUT savoir: le comment, le pourquoi, les détails, toutte le kit.
En général, si Jeanette veut savoir, c'est parce qu'elle s'intéresse à moi. Elle veut me le montrer, démontrer son intérêt pour ma petite personne, et parfois, aussi, en profiter pour montrer aussi qu'elle connaît ça, l'infertilité. Parce que sa belle soeur a fait une fiv. Parce que sa cousine est tombée enceinte quand elle a arrêté d'y penser. Parce qu'elle a déjà fait une fausse couche, et elle insiste: il ne faut pas te décourager, tu vois, moi j'ai eu 2 beaux enfants après.
Bref, je sais bien que toutes les Jeanettes-qui-veulent-savoir du monde entier veulent bien faire.
Mais là, vous savez quoi? Même si elles veulent bien faire, elles me blessent.
C'est pas leur faute, c'est sûr... mais elles me blessent. Quand même.
Et moi, moi qui rushe avec mon pas-de-bébé, avec mon bilan-fausse-couche-version 2009, avec mon cycle qui ne débloque pas, et bien je vais vous dire ce qui se passe entre mes deux oreilles, pour une fois: j'en ai marre, marre, plus que marre de souffrir suite aux commentaires des autres, et par-dessus le marché, de souffrir seule dans ma voiture en revenant chez-moi, en silence, parce que "c'est pas de sa faute", à Jeanette. Elle veut bien faire... je suis pas pour la maltraîter, pauvre elle, elle pourrait être vexée.
J'en ai marre que la première chose que les gens trouvent à me demander quand on se voit soit "Comment va ton traîtement?". J'en ai marre qu'on me demande constamment où j'en suis, qu'est-ce que je fais, comment je vais par rapport à ça. Il me semble que l'équation est plutôt simple à éxécuter: je veux un bébé, ça fait des années que j'attends, c'est long, ça ne vient pas, pis quand ça vient, ça part en fausse-couche douloureuse moralement et physiquement. C'est l'échec, et ça le sera tant que je n'aurai pas un petit chou bien vivant et en santé. Comment ça va par rapport à ça? Mmmh. Plutôt mal, je dirais.
Mais voilà, je suis aussi autre chose, moi, pas qu'une machine à prendre des pilules, pas qu'une fille infertile, pas qu'une paire d'ovaires dysfonctionnels! J'ai une vie, un quotidien, un travail, des activités, des gens que je côtoie, des trucs que j'aime, des envies, des idées. Vous savez, vous avez aussi le droit de me demander si j'aime la lecture, si je fais du sport, si j'aimerais un de ces quatres faire du camping d'hiver, ce que je pense de la limite d'alcool au volant à 0,05% , si j'ai vu Millénium. Pour une fois, je pourrais m'en retourner chez-nous avec de l'enthousiasme et un sourire, plutôt qu'avec des larmes plein les yeux. Avec l'impression d'avoir eu une conversation normale, plutôt qu'avec le feeling que la seule chose qui se passe quand je suis en société, c'est que les gens se relaient pour venir gratter la gale de mon bobo.
Parce que c'est bien ainsi que je me sens: ben oui, c'est une plaie, une douleur, vive parfois, cette foutue infertilité, mais bonyeu, laissez-moi le temps de mettre un plaster dessus. J'ai un bobo, mais je suis capable de fonctionner quand même, de rire, de m'intéresser à plein de trucs, de bouger, d'avancer quand même. J'ai un bobo, mais c'est bizarre, quand j'ai un plaster dessus, il frotte moins sur tout ce qui l'entoure, ça le protège, et on dirait qu'il fait moins mal quand je ne passe pas mon temps à le regarder et à me dire "bordel, j'ai un gros bobo!".
Dernièrement, chaque fois que quelqu'un me parle du bobo en question, ça me ramène à ma douleur, ça me fait à l'intérieur "ah oui, c'est vrai, j'ai ça, c'te bobo là...", ça me fait mal, et puis on enlève le plaster, on constate l'ampleur des dégâts, on gratte un peu la gale, et puis après on me renvoie chez moi en me disant qu'il faut surtout que je reste positive. Et que je n'y pense pas trop.
Euh... c'est parce que... y'aurait pas un message contradictoire là-dedans??
Je suis au point où j'aimerais vraiment que personne ne soit au courant. Que personne ne sache que j'ai fait des fausses couches. Même pas ma famille. Que personne ne soupçonne notre désir d'enfant. Qu'on puisse se soigner tranquilles, juste entre nous, mon chum et moi. Qu'on arrête d'avoir le problème exposé à tous vents. J'ai envie d'inventer de gros mensonges, du genre "je me fais faire la grande opération et on ne veut plus d'enfant, c'est terminé". Du genre "j'ai décidé de me partir un chenil à la place d'une famille". Du genre "c'est décidé, je change de sexe et on devient un couple gai".
Je me trouve complètement nulle de m'être autant ouverte, d'avoir été si translucide, de m'être livrée en pâture comme un bon sujet de conversation dans la basse-cour. Je me trouve stupide.
J'ai oublié de me protéger, de protéger mon bobo. Chaque fois qu'on me l'a demandé, j'ai obéi sagement, et j'ai décollé le plaster, si souvent que la peau sous la colle fait quasiment plus mal que le bobo lui-même. Le fait de me sentir traîtée avec aussi peu de pudeur et de discernement , même si c'est avec de bonne intentions, des fois je me dis que c'est ça qui est le plus difficile. C'est ça qui me fait le plus pleurer. Plus que l'infertilité même.
Alors voilà, c'était mon Oyé Oyé. Fallait que ça sorte. Maintenant, on peut-tu parler d'autre chose? ;-)
Mais trève de détails organiques: là n'était pas le but de mon propos aujourd'hui. Je venais écrire avec l'intention de me livrer, ma foi, sur quelque chose de beaucoup plus intime que ce qui (ne) se passe (pas) entre mes deux jambes...
Aujourd'hui, c'est de moi entre les deux oreilles dont il sera question. Ou peut-être que je devrais dire "entre les deux ventricules"...
***
Voilà: ce n'est plus un secret pour personne dans mon entourage: je suis infertile. Je veux un bébé, je veux être maman. En janvier, je "fêterai" mes 3 années d'essais infructueux avec mon partenaire officiel. Presque tout le monde de mon entourage connait ma situation, et jusqu'à présent, je me suis fait un devoir de parler, de dire ce que je vivais, de ne pas rester dans l'isolement avec mon expérience douloureuse. Avec mon tabou.
J'ai été bavarde, j'ai répondu aux questions, aux "comment vont tes hormones", j'ai expliqué aux curieux et aux curieuses, j'ai invité certains et certaines à venir me lire. Parce que je n'avais pas envie que le poids du tabou vienne s'ajouter à ce que je vivais déjà dans ma douleur de ne pas réussir à avoir un enfant. Aussi parce que je me disais que si personne n'en parle jamais, les gens vont continuer à avoir toutes sortes d'idées préconçues stupides à propos de l'infertilité. Des préjugés, des idées toutes faites, des conseils ignorants qui sont ô combien difficiles, douloureux et choquants à recevoir quand on vit l'infertilité. Quand on vit l'infertilité, et qu'on se fait garrocher au visage toutes sortes de trucs par des gens qui... ne passent évidemment pas par là. Je me suis dit que la cause me tenait assez à coeur pour, en quelque sorte, me pseudo-sacrifier, et en parler, même quand au final, ça aurait été plus facile de me taire, de ne pas tout dire sur moi, de mentir quand on me demandait pourquoi je n'avais pas d'enfant.
Eh ben voilà, Noël approche, avec son lot de connaissances qui vous disent encore une fois "On te souhaite le meilleur pour la nouvelle année!", le mot BÉBÉ imprimé dans le front, comme un message subliminal mal camouflé. Avec, aussi, son lot d'occasions de faire du "sôcial", et de parler de façon plus approfondie avec des gens qu'habituellement, on ne fait que côtoyer... Avec bien entendu son lot de partys, de soupers, et de rencontres de famille remplies d'enfants.
Comme tout le monde connaît ma situation, tout le monde veut savoir. "Puis, comment ça se passe?" "Quoi de nouveau?" "Comment ça va avec tes hormones?" "Là, t'es-tu sous traitement hormonal??" . Jeanette veut savoir. Jeanette veut TOUT savoir: le comment, le pourquoi, les détails, toutte le kit.
En général, si Jeanette veut savoir, c'est parce qu'elle s'intéresse à moi. Elle veut me le montrer, démontrer son intérêt pour ma petite personne, et parfois, aussi, en profiter pour montrer aussi qu'elle connaît ça, l'infertilité. Parce que sa belle soeur a fait une fiv. Parce que sa cousine est tombée enceinte quand elle a arrêté d'y penser. Parce qu'elle a déjà fait une fausse couche, et elle insiste: il ne faut pas te décourager, tu vois, moi j'ai eu 2 beaux enfants après.
Bref, je sais bien que toutes les Jeanettes-qui-veulent-savoir du monde entier veulent bien faire.
Mais là, vous savez quoi? Même si elles veulent bien faire, elles me blessent.
C'est pas leur faute, c'est sûr... mais elles me blessent. Quand même.
Et moi, moi qui rushe avec mon pas-de-bébé, avec mon bilan-fausse-couche-version 2009, avec mon cycle qui ne débloque pas, et bien je vais vous dire ce qui se passe entre mes deux oreilles, pour une fois: j'en ai marre, marre, plus que marre de souffrir suite aux commentaires des autres, et par-dessus le marché, de souffrir seule dans ma voiture en revenant chez-moi, en silence, parce que "c'est pas de sa faute", à Jeanette. Elle veut bien faire... je suis pas pour la maltraîter, pauvre elle, elle pourrait être vexée.
J'en ai marre que la première chose que les gens trouvent à me demander quand on se voit soit "Comment va ton traîtement?". J'en ai marre qu'on me demande constamment où j'en suis, qu'est-ce que je fais, comment je vais par rapport à ça. Il me semble que l'équation est plutôt simple à éxécuter: je veux un bébé, ça fait des années que j'attends, c'est long, ça ne vient pas, pis quand ça vient, ça part en fausse-couche douloureuse moralement et physiquement. C'est l'échec, et ça le sera tant que je n'aurai pas un petit chou bien vivant et en santé. Comment ça va par rapport à ça? Mmmh. Plutôt mal, je dirais.
Mais voilà, je suis aussi autre chose, moi, pas qu'une machine à prendre des pilules, pas qu'une fille infertile, pas qu'une paire d'ovaires dysfonctionnels! J'ai une vie, un quotidien, un travail, des activités, des gens que je côtoie, des trucs que j'aime, des envies, des idées. Vous savez, vous avez aussi le droit de me demander si j'aime la lecture, si je fais du sport, si j'aimerais un de ces quatres faire du camping d'hiver, ce que je pense de la limite d'alcool au volant à 0,05% , si j'ai vu Millénium. Pour une fois, je pourrais m'en retourner chez-nous avec de l'enthousiasme et un sourire, plutôt qu'avec des larmes plein les yeux. Avec l'impression d'avoir eu une conversation normale, plutôt qu'avec le feeling que la seule chose qui se passe quand je suis en société, c'est que les gens se relaient pour venir gratter la gale de mon bobo.
Parce que c'est bien ainsi que je me sens: ben oui, c'est une plaie, une douleur, vive parfois, cette foutue infertilité, mais bonyeu, laissez-moi le temps de mettre un plaster dessus. J'ai un bobo, mais je suis capable de fonctionner quand même, de rire, de m'intéresser à plein de trucs, de bouger, d'avancer quand même. J'ai un bobo, mais c'est bizarre, quand j'ai un plaster dessus, il frotte moins sur tout ce qui l'entoure, ça le protège, et on dirait qu'il fait moins mal quand je ne passe pas mon temps à le regarder et à me dire "bordel, j'ai un gros bobo!".
Dernièrement, chaque fois que quelqu'un me parle du bobo en question, ça me ramène à ma douleur, ça me fait à l'intérieur "ah oui, c'est vrai, j'ai ça, c'te bobo là...", ça me fait mal, et puis on enlève le plaster, on constate l'ampleur des dégâts, on gratte un peu la gale, et puis après on me renvoie chez moi en me disant qu'il faut surtout que je reste positive. Et que je n'y pense pas trop.
Euh... c'est parce que... y'aurait pas un message contradictoire là-dedans??
Je suis au point où j'aimerais vraiment que personne ne soit au courant. Que personne ne sache que j'ai fait des fausses couches. Même pas ma famille. Que personne ne soupçonne notre désir d'enfant. Qu'on puisse se soigner tranquilles, juste entre nous, mon chum et moi. Qu'on arrête d'avoir le problème exposé à tous vents. J'ai envie d'inventer de gros mensonges, du genre "je me fais faire la grande opération et on ne veut plus d'enfant, c'est terminé". Du genre "j'ai décidé de me partir un chenil à la place d'une famille". Du genre "c'est décidé, je change de sexe et on devient un couple gai".
Je me trouve complètement nulle de m'être autant ouverte, d'avoir été si translucide, de m'être livrée en pâture comme un bon sujet de conversation dans la basse-cour. Je me trouve stupide.
J'ai oublié de me protéger, de protéger mon bobo. Chaque fois qu'on me l'a demandé, j'ai obéi sagement, et j'ai décollé le plaster, si souvent que la peau sous la colle fait quasiment plus mal que le bobo lui-même. Le fait de me sentir traîtée avec aussi peu de pudeur et de discernement , même si c'est avec de bonne intentions, des fois je me dis que c'est ça qui est le plus difficile. C'est ça qui me fait le plus pleurer. Plus que l'infertilité même.
Alors voilà, c'était mon Oyé Oyé. Fallait que ça sorte. Maintenant, on peut-tu parler d'autre chose? ;-)